Dans la littérature sur le management de projet, le rôle de sponsor de projet semble apparaître dans les années 70s.
C’est dans cette période que le management de projet s’est développé dans toutes les industries et activités au lieu d’être cantonné aux grands projets de construction, du militaire et de l’aéronautique. Certaines entreprises se sont alors organisées par projet et il est apparu qu’il n’y avait plus assez de leaders business pour conduire directement tous les projets. Ces leaders devaient s’appuyer sur des managers de projet plus opérationnels tout en conservant le rôle de sponsors business et de responsables ultimes du projet.
Étant moi-même un chef de projet comme beaucoup des lecteurs de ce blog, devenir sponsor de projet revient pour nous à traverser le miroir.
Le PM que je suis a des attentes très fortes (tout en essayant de rester lucide) de ce qu’il attend de son ou ses sponsors.
Alors, si je devenais sponsor à mon tour, quelles seraient mes premières préoccupations ?
1. En premier lieu, bien définir mon rôle et mes attentes envers le PM
Au même titre qu’il ou elle aura des attentes de ce que je peux lui apporter. Il est donc nécessaire d’établir une relation de confiance entre nous basée sur des rôles et responsabilités clairement établis, de communications régulières, des règles de vie. Établissons-les en communs lors d’une première session de travail.

2. Être le champion du métier/business en toute légitimité.
Afin de remplir pleinement sa fonction, le sponsor doit être écouté et reconnu de ses pairs dans le business et de son management. Il est donc critique que je prenne contact avec toutes les parties prenantes du projet: les « stakeholders« . J’ai besoin de bien cerner leurs attentes du projet, leurs inquiétudes également, leur niveau d’implication nécessaire, et d’écouter leurs points de vue.
Il sera en particulier souvent nécessaire d’obtenir un accès à leurs meilleures ressources expertes du domaine dans et pour lequel œuvre le projet et de bien comprendre les tenants et les aboutissants de la problématique à adresser.
3. Apporter direction et soutien décisionnel
Voici l’un des rôles clés du sponsor. Il s’agit de donner une direction et un support managérial au chef de projet. Il est donc impératif que j’ai une excellente vue d’ensemble très claire des objectifs du projet et que je sois capable de les articuler et de les communiquer simplement et efficacement.
Et ce, à toutes les parties prenantes: le chef de projet et son équipe bien sûr, mais aussi le management de l’entreprise, les clients, les fournisseurs, y compris ou peut-être même en particulier vers tous ceux qui semblent moins directement impactés mais qui auraient une grande influence dans la société (pas toujours les plus hauts placés).
4. Revoir et approuver les plans et livrables
Au-delà de l’adéquation des livrables et plans de projet aux objectifs concrets du projet que nous avons établis ensemble, mon rôle de sponsor est d’améliorer ces livrables et de les approuver formellement.
Les meilleurs sponsors que j’ai eu en tant que PM, avaient la capacité de voir plus loin que les livrables en eux-mêmes. Ils percevaient à l’avance comment ces produits seraient accueillis selon les attentes des diverses parties prenantes. Ils anticipaient les éventuelles réactions négatives pour les prévenir, souvent par des modifications cosmétiques en apparence mais qui faisaient la différence.
Ils avaient toujours un ou deux coups d’avance dans leur réflexion par rapport à mon focus nécessairement plus opérationnel.
5. Assurer la disponibilité des ressources allouées (y compris la mienne)
Je me montrerai exigent, voire intransigeant sur la mise à disposition dans les temps des ressources promises à l’équipe projet pour réussir.
Comment être sévère sur toute dérive du projet si les moyens agréés ne sont pas fournis?
Le plus difficile sera probablement ma propre disponibilité envers le chef de projet. Elle doit être facile à obtenir, sans délais, et surtout 100% de mon attention doit être dédiée au projet dans ces occasions de rencontre.
6. Éliminer les obstacles
En sus de fournir les ressources nécessaires, j’ai le devoir d’intervenir efficacement pour débloquer les situations complexes ou les crises que le PM malgré tous ses efforts (car c’est en premier lieu son rôle) ne saurait résoudre.
Il ne s’agit pas de déresponsabiliser le PM ni de se substituer à elle ou lui mais au contraire de fournir le support dont elle/il a besoin quand cela est nécessaire.
7. Établir et trancher sur les priorités
Que faire? Décaler une mise en production de quelques jours ou dépasser le budget?
Le PM saura me fournir les arguments pour et contre de ces deux alternatives, et éventuellement sa recommandation.
La décision m’en reviendra (avec le comité de projet) et je devrai prendre en compte les objectifs et impératifs business, les impacts opérationnels et commerciaux, les parties prenantes…
8. Examiner régulièrement l’état d’avancement

Une combinaison de réunions formelles et informelles me semble une bonne base d’efficacité. Le coté formel des comités de projet et autres revues de jalons et de documents est nécessaire mais souvent insuffisant. En effet, ce n’est pas en lisant un rapport ou en écoutant un laïus de présentation bien rodé que l’on perçoit ce qui se passe réellement.
Il faut lire entre les lignes, comprendre les non-dits, les intangibles, apprécier les difficultés du PM et avoir une vraie relation humaine.
Dans mes projets passés, de brèves (30 minutes) sessions fréquentes (hebdomadaires) et régulières m’ont paru être les plus efficaces.
9. Promouvoir une communication franche et ouverte (bas les masques !)
Pour avoir l’info vitale, y compris les mauvaises nouvelles difficiles à entendre, il faut que de mon coté je sois franc et ouvert avec le PM. Communiquer sans tabou ni agenda caché est un pré-requis.
Hormis certaines informations de nature à mettre à risque la société au plan légal (certaines infos financières par exemple, ou des réorganisations et acquisitions), tout peut être expliqué avec un peu d’intelligence et de confiance.
10. Fournir des standards de performance
Être ouvert et approchable ne signifie pas être permissif. Mes meilleurs sponsors étaient intransigeants envers mon équipe et moi-même. J’avais très clairement leur support et je savais parfaitement ce qu’ils attendaient de moi. Nous avions des standards de qualité et de performance très élevés et ils étaient partagés.
11. Développer une organisation qui apprend de ses erreurs et de ses réussites
Enfin, en tant que sponsor d’un projet important de la société et donc membre du senior management, je me dois de développer les compétences et le savoir-faire des ressources qui me sont confiées et m’assurer que les leçons apprises bénéficieront aux futurs projets.